En face la SNECMA, je m'arrête au feu rouge avant de prendre le pont d'Argenteuil. Sur ma droite, une femme dans une mini bleue au toit peint en damier conduit un bébé dans son siège baquet et une petite fille qui me regarde. Elle a l'air d'avoir peur de moi, alors je lui fait un sourire, mais rien n'y fait, elle me regarde bizarrement. Tant pis, je suis un croque-mitaine.

La citrouille est par essence un terme générique. Depuis longtemps, elle est le porte-étendard d'une famille vaste et méconnue, celle des cucurbitacées ou courges, peut-être en raison de sa taille imposante et de sa couleur souvent trop vite assimilée à l'orange, mais c'est un peu comme si on appelait n'importe quelle pomme une golden. La citrouille, de par sa taille masque donc toutes les courges qui se trouvent derrière, et Dieu sait qu'elles sont nombreuses, de toutes tailles, de toutes formes et de toutes les couleurs. Ces dernières années, avec le retour d'Halloween sur notre continent, elle a refait son apparition dans nos assiettes ou dans notre intérieur comme objet de décoration, et les autres avec elle, coloquintes, sweet dumpling et autres jack-be-little. Ce sont toutes ces exceptions, ces petites ou grosses beauté de la nature que nous allons vous présenter ici. Les courges à proprement parler trouvent leur origine en Amérique Centrale et au Mexique, il y a de cela quelques 10500 ans, mais le continent n'a pas le monopole car il s'en trouve alors dans le monde entier à plusieurs époques relativement proches et contrairement à ce que l'on pourrait croire, elles ne servent pas à la consommation mais en tant qu'objets usuels. En effet, depuis des temps reculés, la gourde est utilisée, après dessication de la peau, comme écuelle, louche, récipient multifonctionnel, instrument de musique - comme caisse de résonnance -, et à la fin du compte, il semblerait que la citrouille soit venue en Europe à l'époque des grands explorateurs dans les mêmes caisses que la patate ou la tomate. La courge, dans son éthymologie, cucurbita, est pourtant déjà connue par les Romains et c'est au XIIIè siècle qu'apparaît le mot citrouille dans la langue française. Nous avons donc là un problème qui remonte à bien longtemps, celui de la confusion entre les termes de courge et de citrouille. L'origine exacte de telle ou telle reste un tant soit peu mystérieuse, ce qui n'est pas fait pour lui déplaire.

Lorsqu'on parle de citrouille ou de courge, il faut savoir que ce ne sont, dans les plus connues, que quelques représentants d'une vaste famille, même si, avec ses 800 espèces, elle ne fait pas le poids par rapport à beaucoup de végétaux. La famille cucurbitacées comprend en tout 120 genres divisés en 800 espèces. Les cinq genres les plus connus sont: - cucurbita (courges) - lagenaria (gourdes) - luffa (éponge végétale) - citrullus (pastèques) - cucumis (concombre, melon) Le genre cucurbita qui nous intéresse est lui-même représenté par cinq espèces répandues: - cucurbita pepo (citrouille, courgette) - cucurbita maxima (potirons, giraumons) - cucurbita moschata (musquées) - cucurbita mixta (intermédiaires) - cucurbita ficifolia (courge de Siam) Le genre cucurbita, lui, est défini par des caractérisques communes à tous ses représentants: branche à fruit contenant plusieurs graines, fleurs jaunes solitaires et mâles, feuilles entières ou lobées, fleur à grande corolle campanulée à pétales séparés en haut et à vrilles vigoureuses (reptation, ascension). Vous voici entrés dans la famille cucurbita.

Rien de plus facile que de cultiver les courges. Si certaines espèces de végétaux réclament des soins vraiment contraignants ou des conditions climatiques particulières, il n'en est pas vraiment pas de même pour les courges. Quelques petites manipulations horticoles et zip... vous vous retrouvez avec des courges à foison, rampant dans votre potager comme des lianes poussant à vue d'oeil. La courge est un légume dont l'origine est tropicale, ce qui inclut qu'elle réclame beaucoup de soleil, mais il faut savoir que l'eau est aussi un élément déterminant. Si les tiges poussent mais si les fruits ne grossissent pas, ne cherchez pas plus loin, chaque pied nécessite un arrosoir chaque jour. Les courges aiment les terrains organiques, riches en fumure ou en compost. Vous pouvez donc tout à fait planter vos graines directement sur un tas de fumier ou de compost en décomposition, cela n'affectera en rien ses qualités gustatives, bien au contraire, les courges n'en seront que meilleures. N'hésitez donc pas à apporter à votre terre une bonne dose de fumure organique ou de fumier avant de planter vos graines. Un conseil utile: plantez-les vers mi-avril, pas avant car vos jeunes pousses à la croissance rapide pourraient se trouver détruites par une légère gelée matinale, et évitez les poquets de terreau en godet car les graines semées en pleine terre (pas plus de 2 cm sous la surface) donneront des plants plus robustes et prolifiques. Méfiez-vous de l'espèce que vous semez, car avec une espèce comme cucurbita ficifolia (courge de Siam), vous devez savoir qu'elle prolifère de 11 mètres en tous sens. A moins d'avoir un champ comme potager, préférez courgettes vertes non coureuses ou rouge vif d'Etampes pour les plus grosses (que vous aurez soin d'enroulez sur un mètre carré). Certains cultivateurs de courges et la plupart des manuels de jardinage vous diront de couper la tige après la quatrième feuille pour la faire se ramifier, mais point n'est besoin de sacrifier une tige que vous verrez pousser à vue d'oeil, laissez les courrir, elles vous impressionneront. Par contre, ne laissez que deux ou trois fruits par pied pour les petites espèces et un seul pour les grosses, cela aura comme effet de fortifier les fruits en place. Laisser pousser vos fruits jusqu'en automne... ils sont déjà gros mais peut-être que leur chair n'est pas encore tout à fait mûre. Ne le coupez que vers les premières gelées (bien au dessus du pédoncule) et pour éviter que le fruit ne se détériore au contact du gel, bâchez le pied. Autre chose, les fruits posés à même la terre risquent de pourrir: pour éviter une perte, placez une tuile ou une dalle sous chaque fruit, la présence du minéral ayant pour effet de garder la chaleur les nuits d'été. Conservez ensuite vos fruits au sec et à l'abri de la lumière... certains se conservent ainsi plus d'un an... Bon appétit!

Voici une recette simple à partir d'un légume méconnu aux saveurs pourtant fines et originales. 1 beau potimarron de 1 kg 1 échalotte 1 gousse d'ail 2 petites pommes de terre 1 tablette de bouillon de volaille 1,5 l d'eau 1/2 l de lait Quelques feuilles de basilic Une cuiller à soupe d'huile d'olive Epluchez le potimarron à l'aide d'un couteau à julienne ainsi que les pommes de terre. Découpez la courge et épépinez-la, coupez-la en petits morceaux et faites la revenir avec les pommes de terre dans un faitout avec l'huile d'olive. Faites bien dorer, y jeter échalotte et ail épluchés, puis mouiller avec l'eau et jeter la tablette de bouillon. Assaisonnez et laisser cuire à feu doux pendant une demi-heure. Au dernier moment, verser le lait et passez le velouté. Avant de servir, découpez les feuilles de basilic et mélangez. C'est prêt! Parfait petit plaisir d'automne.

Ces textes proviennent de l'ancienne version de Lithium Sunset.

Du 09 au 17 août 2003 -->> c'est par là